Qualification délictuelle de l'action en responsabilité pour rupture des relations commerciales en droit international privé commun
L’arrêt du 12 mars 2025 était attendu car il se positionne, en droit international privé, sur la question de la nature de l’action en responsabilité pour rupture brutale de relations commerciales établies. Certains appelaient de leurs vœux un alignement sur la jurisprudence de la CJUE qui, dans son arrêt Granarolo en 2016, a rejeté la qualification délictuelle lorsque la rupture était précédée de relations contractuelles tacites. Ce n’est pas la position de la Cour de cassation. Elle juge en effet que l’action est de nature délictuelle, tout au moins lorsqu’il est question de déterminer la compétence des juridictions françaises. Cette solution appelle des commentaires sur son opportunité et son impact.
Cass. 1re civ., 12 mars 2025, no 23-22051
Face à un contentieux de droit international privé, la première question qui se pose est celle de la qualification du rapport de droit litigieux. En effet, de la réponse à cette question dépendent non seulement les options de compétence juridictionnelle ouvertes au demandeur mais également l’identification de la règle de conflit de lois applicable pour déterminer le droit qui gouvernera la question au fond.
Au regard des enjeux de la qualification, on comprend que certaines prises de position de la Cour de cassation soient attendues.
Or, l’affaire qui a donné lieu à l’arrêt du 12 mars 2025 a justement permis à la Cour de cassation de trancher, pour la[...]
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Cass. 1re civ., 19 oct. 1959, Pelassa : Bull. civ. I, n° 416 ; JDI 1960, p. 486, obs. J.-B. Sialelli ; D. 1960, p. 37, note G. Holleaux ; Rev. crit. DIP 1960, p. 215, note Y. L.
Cass. 1re civ., 30 oct. 1962, Scheffel : Bull. civ. I, n° 449 ; D. 1963, p. 109, note G. Holleaux ; Rev. crit. DIP 1963, p. 387, note P. Francescakis.
Attention : l’article 46 du CPC ne peut en aucun cas fonder la compétence des juridictions de l’État américain où la distribution ou la livraison à lieu. Le juge américain se fonde sur ses propres règles, notamment celles issues de la jurisprudence de la Cour suprême dans l’arrêt Pennoyer v. Neff, 95 U.S. 714 (1878).
Cass. com., 6 févr. 2007, n° 04-13.178 – Cass. com., 13 janv. 2009, n° 08-13.971 : Bull. civ. IV, n° 3 ; Contrats, conc. consom. 2009, comm. 72, note N. Mathey ; RDC 2009, p. 1016, obs. D. Mazeaud ; RLC 2009/21, n° 1464, obs. M. Behar-Touchais – Cass. com., 22 sept. 2015, n° 13-27.726 : Bull. civ. IV, n° 836 ; Contrats, conc. consom. 2015, comm. 281, note N. Mathey.
J. Maury, « Règles générales de conflit de lois », in R.C.A.D.I., t. 57, 1936, III, p. 325 et s., spéc. p. 458.
Cass. 1re civ., 22 juin 1955 : Rev. crit. 1955, p. 723, note H. Batiffol ; D. 1956, p. 73, note B. Chavrier.
CJUE, 14 juill. 2016, n° C-196/15, Granarolo : Juris-Data n° 2016-019136 ; Procédures 2016, comm. 361, note C. Nourissat ; Contrats, conc. consom. 2016, comm. 235, note N. Mathey ; Rev. crit. DIP 2016, p. 703, obs. F.-X. Licari ; D. 2016, p. 2025, obs. L. d’Avout et S. Bollée ; RTD civ. 2016, p. 837, obs. H. Barbier ; Europe 2016, comm. 375, obs. L. Idot ; D. 2016, p. 2223, point de vue F. Buy ; RLC 2016/53, n° 3012 ; RLC 2016/53, n° 3032, note N. Kouchnir-Cargill et E. Camilleri.
P. Mayer, V. Heuzé et B. Rémy, Droit international privé, 12eéd., 2019, Montchrestien, n° 171, p. 134 ; P. de Vareilles-Sommière et S. Laval, Droit international privé, 11e éd., 2023, Dalloz, n° 356, p. 261.
P. Mayer, V. Heuzé et B. Rémy, Droit international privé, 12eéd., 2019, Montchrestien, n° 170, p. 133 ; G. de Geouffre de La Pradelle et de M.-L. Niboyet, Droit international privé, 7e éd, 2020, LGDJ, n° 319, p. 234, EAN : 9782275102368.
J.-F. Quievy, « Sérieux doutes sur la nature délictuelle de la responsabilité pour rupture brutale de relations commerciales établies », GPL 8 oct. 2024, n°GPL467p2.
CJCE, 8 mars 1988, n° C-9/87, Arcadio : JDI 1989, p. 453, note A Huet ; Rev. crit. DIP 1988, p. 610, note H. Gaudemet-Tallon.
Point 16 de l’arrêt.
En faveur de la qualification de loi de police : CA Paris, 9 janv. 2019, n° 18/09522 – Pour un refus d’une telle qualification : CA Paris, 2 juill. 2024, n° 21/17912 : LEDICO oct. 2024, n° DDC202p1, p. 7, obs. A. Joubert.
Cass. com., 8 juill. 2020, n° 17-31.536 : GPL 22 sept. 2020, n° GPL387s4, obs. H. Meur ; LEDC oct. 2020, n° DCO113j7, p. 5, J.-F. Hamelin.
Cass. 1re civ., 22 oct. 2008, n° 07-15.823 : Contrat, conc. consom. 2008, comm. 270, M. Malaurie-Vignal ; JCP 2008, II, 10187, note L. d’Avout – v. également, Cass. 1re civ., 18 janv. 2017, n° 15-26105 : LEDICO mars 2017, n° DDC110e8, obs. A. Joubert.
En ce sens, N. Mattey, « Rupture de relations commerciales établies – Nature de la responsabilité pour rupture brutale : la position de la CJUE », Contrat, conc. consom. nov. 2016, n° 11, comm. 235.
J. Jourdan Marques, « Le contentieux international de la rupture brutale des relations commerciales établies » AJ contrats févr. 2019, p. 60.
JCl. Europe traité, fasc. 3206, « Règlement (CE) n° 864/2007 du 11 juillet 2007 sur la loi applicable aux obligations non contractuelles (“Rome II”) », C. Brière, (mise à jour 15 mars 2023).
CA Paris, 6 sept. 2023, n° 21/05718 : LEDICO déc. 2023, n°DDC201z1, obs. H. Meur– CA Paris, 7 févr. 2024, n° 22/02149 : LEDICO mai 2024, n° DDC202h9, obs. H. Meur.
Cass. com., 25 mars 2014, n° 12-29534 : GPL 17 avr. 2014, n° GPL174t5, C. Berlaud ; JCP G 2014, 619, D. Bureau ; Rev. crit. DIP 2014, p. 823, note O. Boskovic.
Cass. com., 7 mai 2019, n° 17-15.340 : Contrat, conc. consom. juill. 2019, comm. 124, N. Matthey ; JCP E 2019, chron. 1432, G. Bourdeaux, M. Menjucq, C. Nourissat.
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Plan
- 1Qualification délictuelle de l’action en responsabilité pour rupture des relations commerciales en droit international privé commun
- 1.1I – Justifications de la qualification délictuelle de la responsabilité pour rupture brutale des relations commerciales
- 1.2II – La Cour de cassation aurait-elle dû aligner sa jurisprudence sur celle de la CJUE ?
- 1.3III – La qualification de la responsabilité pour rupture brutale dans le cadre du conflit de lois