Les deux temps de l'affacturage inversé
Dans un arrêt très récent du 11 mars 2025, la cour d’appel de Paris s’est prononcée sur le mécanisme à l’œuvre dans l’affacturage inversé. La réception par l’affactureur du fichier de dettes du client, le paiement par l’affactureur du fournisseur et le transfert subrogatoire de la créance de celui à l’affactureur seraient concomitants. La Cour en déduit que l’affactureur est tenu de régler le fournisseur. Au vrai, l’affacturage se scinde en deux phases, la réception de l’ordre de paiement du client et le paiement par l’affactureur du fournisseur. S’il s’opère une subrogation conventionnelle dans un deuxième temps, la première phase doit s’analyser, en fonction des clauses de la convention, en une indication de paiement ou une délégation de paiement.
CA Paris, 5-16, 11 mars 2025, no 24/01119
1. Depuis une dizaine d’années émerge une figure inédite, dénommée en français « affacturage inversé » et en anglais reverse factoring, dont les tribunaux français commencent à connaître1. Jusqu’à présent, les débats judiciaires portaient sur la question de savoir si les commissions impliquées par ce montage créent un éventuel déséquilibre significatif entre les droits et obligations des fournisseurs et du client au sens du Code de commerce2. Une décision récente de la cour d’appel de Paris, en date du 11 mars 2025, fournit désormais l’occasion aux civilistes, au[...]
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V. la note de la Banque de France à son sujet, https://lext.so/kcRNwY.
CA Paris, 5-4, 14 févr. 2017, n° 14/04886 – dans la même affaire, T. com. Paris, 19e ch., 18 oct. 2017, n° 2016064825 – T. com. Paris, 19e ch., 27 juin 2018 ; T. com. Paris, 19e ch., 14 nov. 2018 – T. com. Paris, 19e ch., 6 juin 2021 – CA Paris, 1-5, 9 nov. 2021, n° 21/13591.
T. com. Paris, 6e ch., 16 nov. 2023, n° 2022056628.
Il indiffère que cet ordre lui soit transmis directement par le client ou par un tiers, par exemple un intermédiaire en service de paiement (C. mon. fin., art. L. 519-1).
P. F. Girard, Manuel élémentaire de droit romain, 1906, éd. A. Rousseau, p. 447, qui rappelle que l’adjectus solutionis gratia était désigné par le créancier pour recevoir paiement du débiteur, sans droit de poursuivre ce dernier ; Digeste, 46, 3, De solut., 53.
L. Andreu, Du changement de débiteur, 2010, Dalloz, Nouvelle bibliothèque des thèses, n° 8, note 43. Il faut comprendre, dans une indication au débiteur, que l’indiquant tient le rôle de créancier de l’indiqué, et l’indicataire, de créancier de l’indiquant ou une personne qui souhaite lui rendre un service. Dans l’indication au créancier, l’indiquant fait figure de débiteur de l’indiqué, et l’indicataire, de débiteur de l’indiquant ou une personne qui entend lui rendre un service.
Cass. com., 24 oct. 2000, n° 97-13.036 – Cass. 1re civ., 5 mai 1998, n° 96-15.033. En doctrine, J. François, Les obligations, Régime général, 5e éd., 2020, Economica, n° 647 ; G. Chantepie et M. Latina, Le nouveau droit des obligations, Commentaire théorique et pratique dans l’ordre du Code civil, 3e éd., 2024, Lefebvre Dalloz, n° 908, p. 951-952 ; N. Dissaux et C. Jamin, Réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations, Commentaire des articles 1100 à 1386-1 du Code civil, 2016, Dalloz, p. 198 ; F. Terré, P. Simler, Y. Lequête et F. Chénedé, Droit civil, Les obligations, 12e éd., 2018, Précis Dalloz, n° 1734 ; A. Bénabent, Droit civil, Les obligations, 2019, LGDJ, n° 735, EAN : 9782275130576. Plus dubitatif, M. Julienne, Régime général des obligations, 4e éd., LGDJ, n° 456, EAN : 9782275109718.
S. Dominguez, L’indication de paiement, thèse, 2004, Toulouse, (microfiches), spec. nos 206-207, 209, 226, 228, dont la thèse présente le mérite de mettre en lumière l’indisponibilité, avant l’exécution de l’indication, de la créance de l’indiquant sur son débiteur indiqué ou celle du créancier indiqué sur le débiteur indiquant (nos 356-381).
F. Collart Dutilleul et P. Delebecque, Contrats civils et commerciaux, 11e éd., 2023, Précis Dalloz, n° 632.
Cass. 3e civ., 23 nov. 2017, n° 16-17.764 (fermage) : N. Catala, La nature juridique du paiement, thèse, Paris 1960, impr. Reschly.
Contra, S. Dominguez, L’indication de paiement, thèse, 2004, Toulouse, qui estime que l’indiquant ne peut mettre fin unilatéralement au contrat porteur de l’indication, en l’absence d’un mutuus dissensus (n° 375).
M. Julienne, Régime général des obligations, 4e éd., LGDJ, n° 455, EAN : 9782275109718 ; S. Dominguez, L’indication de paiement, thèse, 2004, Toulouse, fonde cette règle plus simplement sur l’effet relatif des conventions et l’observation que l’indicataire est tiers penitus extranei, étranger au contrat porteur de l’indication de paiement (n° 355).
Cass. com., 20 févr. 2007, n° 05-18.444 – Cass. com., 8 juill. 2008, n° 07-12.759 – Cass. com., 24 nov. 2009, n° 08-19.596 – Cass. com., 29 févr. 2000, n° 97-15.935.
F. Grua, Contrats bancaires, tome 1, Contrats de services, 1990, Economica, n° 124.
Cass. com., 14 janv. 2003, n° 00-15.694, qui analyse en un « simple paiement pour compte », et non en une novation ou une délégation, une convention prévoyant qu’un sous-traitant donnait à l’entreprise principale un ordre de paiement irrévocable pour son compte.
Comp., en matière de preuve de l’ordre de paiement par carte bancaire, Cass. com., 8 nov. 1989, n° 86-16.197.
E. Gaudemet, Étude sur le transport de dettes à titre particulier, thèse, 1898, Paris, éd. Pantheon-Assas ; J. Flour, J.-L. Aubert, E. Savaux, L. Andreu et V. Forti, Droit civil, Les obligations, Le rapport d’obligation, Sirey, 10e éd., n° 206 ; J. François, Les obligations, Régime général, 5e éd., 2020, Economica, n° 665 ; G. Chantepie et M. Latina, Le nouveau droit des obligations, Commentaire théorique et pratique dans l’ordre du Code civil, 3e éd., 2024, Lefebvre Dalloz, n° 911, p. 951-952 ; M. Julienne, Régime général des obligations, 4e éd., LGDJ, n° 430, EAN : 9782275109718 ; F. Terré, P. Simler, Y. Lequête, F. Chénedé, Droit civil, Les obligations, 12e éd., 2018, Précis Dalloz, n° 1743.
J. François, Les obligations, Régime général, 5e éd., 2020, Economica, n° 642.
Cass. com., 12 nov. 2008, n° 07-17.889.
Cass. 1re civ., 7 avr. 1998, n° 96-18.210 : Bull. civ. I, n° 144.
Comp. CJUE, 17 déc. 2020, n° C-801-19, décrivant un règlement d’au moins 95 %.
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